Alors que le Premier ministre Joseph Dion Ngute inaugurait ce vendredi, 25 avril 2025 le « Palais de verre Paul Biya« , nouveau siège de l’Assemblée nationale, l’absence du président, éloigné des affaires publiques depuis des mois, a relancé les interrogations sur sa capacité à diriger le pays. Pourtant, face à un pouvoir rodé et bien organisé, l’opposition camerounaise, minée par les divisions et les querelles d’ego, semble une nouvelle fois incapable de former un front uni à quelques mois de la présidentielle d’octobre.
À 92 ans, Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, s’apprête à briguer un huitième mandat, une longévité politique rarement égalée sur le continent. Son parti, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), maîtrise parfaitement les rouages du pouvoir : contrôle des institutions, soutien des chefs traditionnels, alliances stratégiques et maillage territorial serré. « Le RDPC a transformé l’élection en une mécanique bien réglée« , analyse un observateur politique sous couvert d’anonymat. « Ils ont l’argent, l’administration et une opposition qui s’autodétruit. »
En face, les partis d’opposition accumulent les handicaps : division chronique entre Maurice Kamto (MRC), Cabral Libii (PCRN) et Akere Muna (Now!), aucun leader ne parvient à fédérer ; manque de moyens avec une incapacité à couvrir tout le territoire ; répression et code électoral biaisé qui découragent toute contestation sérieuse. Le Social Democratic Front (SDF), autrefois poids lourd, est en déclin depuis la mort de John Fru Ndi.
Si l’âge et l’absence prolongée du président alimentent les rumeurs sur son état de santé, le RDPC a verrouillé le terrain : soutien des élites et des chefs traditionnels, grands projets comme argument électoral, stratégie de mobilisation électorale agressive. « Le système est conçu pour que Biya gagne, même avec un score ajusté« , confie un diplomate occidental.
Certains acteurs tentent pourtant de réagir : pression pour l’inscription sur les listes électorales, mobilisation jeune via les réseaux sociaux, possibilité d’une coalition de dernière minute. Mais le temps presse. Sans unité, sans moyens et face à un pouvoir déterminé, l’opposition risque de se heurter une fois de plus au « mur Biya ».
À six mois du scrutin, le Cameroun semble s’acheminer vers un nouveau mandat de Paul Biya. Pourtant, dans un contexte africain marqué par des alternances inattendues, rien n’est jamais écrit d’avance. Reste à savoir si l’opposition saura saisir sa chance… ou si elle continuera à se battre dans l’arène des egos plutôt que sur le terrain des urnes.