À quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre 2025, le régime de Paul Biya déploie une stratégie politique subtile mais implacable pour asphyxier toute opposition crédible. Les récentes candidatures de l’ex-ministre Issa Tchiroma Bakary et de Bello Bouba Maïgari, président de l’UNDP et allié historique de Biya, s’inscrivent dans un scénario bien rodé visant à créer l’illusion d’une compétition démocratique tout en écartant méthodiquement les véritables challengers, au premier rang desquels Maurice Kamto.
Depuis 1982, Paul Biya, aujourd’hui nonagénaire, n’a eu de cesse de conserver le pouvoir. Sa candidature en 2025, malgré l’état catastrophique du pays fracturé politiquement, asphyxié économiquement et déliquescent socialement, confirme cette logique de conservation à tout prix du pouvoir. Les récentes « défections » de figures du régime, présentées comme des ruptures, ne sont en réalité que des éléments d’une mise en scène soigneusement orchestrée.
La manœuvre est triple : crédibiliser un processus électoral verrouillé en donnant le change sur la pluralité politique, saturer l’espace médiatique pour masquer l’absence de réelle opposition, et surtout neutraliser la menace que représente Maurice Kamto. Le leader du MRC se retrouve pris au piège d’une loi électorale taillée sur mesure. Privé d’élus après le boycott des législatives de 2020, il ne peut réunir les 300 signatures requises (dont 10 par région) dans un climat de répression, et l’option de se présenter sous une autre bannière impliquerait d’abandonner son propre parti, une perspective relativement complexe pour ce leader qui se retrouve face à ses incohérences et déboires.
En réalité, le régime ne craint pas une défaite électorale, le système est conçu pour rendre Biya invincible, mais redoute une contestation post-électorale massive comme en 2018. En écartant Kamto par des moyens « légaux », le pouvoir évite un face-à-face potentiellement mobilisateur.
Les conséquences de cette mascarade pourraient plonger le Cameroun dans un immobilisme total. Avec une opposition neutralisée et un pouvoir sclérosé, le pays risque de sombrer dans une paralysie institutionnelle et économique sans précédent. La jeunesse, déjà privée de perspectives, pourrait soit se résigner à une léthargie politique désespérante, soit exploser dans une colère incontrôlable. Quant à la communauté internationale, complice par son silence habituel, elle devra composer avec un pays bloqué dans un statu quo dangereux, où les réformes indispensables resteront lettre morte. Le Cameroun s’achemine ainsi vers un nouveau mandat de Paul Biya qui pourrait sceller l’enlisement définitif du pays.